Qui obtient 100/100 à l'écrit d'un concours ?
▶ Réponse
: Le candidat qui aura traité le plus de questions sera celui qui
obtiendra 100/100 à l'épreuve. Les autres candidats seront donc tous
noté par rapport à la meilleure prestation.
A la limite, si un problème est infaisable et ne contient que dix
questions, et si le meilleur des candidats réussit seulement à traiter
trois questions, et bien ce candidat recevra la note de 100/100 et les
autres notes seront ramenées à ces 100 points par une règle de trois. J'ai pu vérifier cette règle par moi-même, puisque j'ai eu la chance
d'obtenir 100/100 à la seconde épreuve de l'agrégation interne 1990
alors que je n'avais traité que 42% du sujet ! On le voit sur le papier
que j'ai reçu après les épreuves :

Dans la pratique, rares son ceux qui obtiennent 100/100.
Quelques candidats obtiennent de bonnes notes et se "séparent du
peloton" pour des tas de raisons : ils peuvent avoir été
particulièrement en forme ce jour-là, avoir étudié la bonne partie du
programme quelques mois avant de passer les épreuves, ou avoir
carrément traité tant de problèmes d'annales qu'ils ont ensuite
reconnus plusieurs questions déjà travaillées dans le sujet proposé, et
qu'ils ont su en profiter.
On peut penser à l'arrivée d'un peloton de cyclistes : quelques-un ont
beaucoup d'avance, mais le gros du peloton arrive au même moment, et
certains sont très distancés. C'est ce qui se passe dans un concours :
quelques candidats se démarquent, beaucoup de candidats se retrouvent
dans le peloton (en tête ou à la queue), et l'on comprend mieux
pourquoi la barre d'admissibilité est souvent placée dans un endroit
très dense (au milieu du peloton). Une seconde correction des copies situées à proximité de la barre
d'admissibilité est souvent nécessaire pour classer les candidats de
façon plus fine et savoir où se trouvera le dernier admissible.
Cette seconde correction est faite avec un barême encore plus précis,
et en cas d'égalité des notes de plusieurs copies à l'endroit sensible
du partage entre admissibles et non admissibles, certaines priorité
entrent en jeu : par exemple, on peut estimer qu'à notes égales, le
candidat qui a mieux réussi en géométrie qu'en analyse passe devant. ▶ Combien de questions doit-on traiter ? Sans
crainte de se tromper, on peut affirmer que plus le volume de questions
traitées dans un problème posé à l'écrit est important, plus la chance
d'être admissible est grande. C'est pour cette raison qu'il n'est pas mauvais d'envisager l'écrit
comme une course pour engranger des points là où on on peut les
trouver.
On peut penser
à l'ancien jeu de plates-formes Mario Bross où le héros devait
avancer et sauter de-ci de-là, pour attraper des bonus. A l'écrit,
c'est exactement ce qu'il faut faire : avancer, ne jamais resté fixé
trop longtemps sur une question surtout si l'on s'aperçoit que l'on
perd son temps, regarder sa montre, se dire à l'avance combien de
minutes on se donne pour résoudre une question et à quel moment on
devra à nouveau faire un choix entre se laisser plus de temps pour
conclure ou passer à une autre question plus prometteuse.
Je pense qu'il ne faut pas hésiter à sauter les questions que l'on
arrive pas à résoudre en un temps raisonnable. Il ne faut pas se
martyriser en essayant à tout prix de donner des réponses qu'on ne
trouve pas, mais plutôt trouver ce que l'on sait faire dans le problème
pour en profiter pleinement. De toute façon, on peut se rassurer :
- si l'on saute trop de questions, il arrive naturellement un moment où
l'on touche la fin du problème. A ce moment, il n'y a plus d'autre
solution que de retourner sur une des questions sautées pour y
réfléchir à nouveau.
- une question peut être sautée pour des raisons stratégiques, et rien
n'empêche jamais d'y retourner avant la fin de l'épreuve, dès qu'on le
désire, ou si l'on ne trouve rien de mieux à traiter dans le problème.
Sauter des questions ne nous fait donc pas perdre quoi que ce soit.
- l'important est de sortir de la salle à la fin de l'épreuve sans
devoir s'apercevoir que l'on n'a pas abordé une question ou une partie
que l'on connaissait bien et où l'on aurait pu briller ! Ne rions pas,
cela arrive trop souvent, comme j'ai pu le constater à la sortie des
épreuves écrites... Retenons : le
candidat doit prendre les points là où il peut les prendre, et ne
jamais oublier de traiter les questions qu'il sait résoudre, quelles
que soient la position de celles-ci dans le problème.
▶ On sait maintenant que le problème est trop long pour être traité en
entier, qu'il faut traiter le plus de questions possibles, et qu'on a
le droit de sauter toutes les questions dont on ne trouve pas de
réponse en un temps raisonnable pour répondre à toutes les questions où
l'on a quelque chose à dire, quitte à revenir sur les questions
difficiles lorsque l'on ne peut plus faire autrement. Nous venons de mettre au point un algorithme à appliquer devant le problème le jour de l'épreuve.
▶ Une autre question vient à l'esprit : quelle proportion d'un problème doit-on traiter pour avoir de bonnes chances d'être admissible ? La
réponse ne peut être qu'imparfaite tant les paramètres sont nombreux.
Ces paramètres sont la longueur du problème, sa difficulté, le nombre
de candidats qui passent l'épreuve, leur niveau de préparation, et bien
entendu le nombre de postes au concours pour l'année en cours.
Pour essayer d'y voir clair, je suis allé exhumer les deux textes de
l'agrégation interne de 1990 que j'avais passée avec succès, où j'avais
pris soin, au sortir des épreuves, de marquer exactement les questions
que j'avais traitées. d'ailleurs je vous proposes ces textes ici :
toutes les parties hachurées n'ont pas été traitées, mais par contre
j'avais pu traiter toutes les parties non hachurées. Voici la composition 1 et voici la composition 2. Il est facile de recouper ces informations avec le relevé de notes que j'ai conservé et qui est reproduis plus haut. J'obtiens les tableaux suivants :

La colonne S indique le nombre de questions traitée avec succès. la
colonne NA donne le nombre de questions que je n'avais pas abordé sur
la copie que j'avais rendue. On peut tout de suite dire
que l'on peut avoir une note maximum de 100/100 en traitant seulement
42% du problème ! On peut aussi noter qu'il m'a fallu répondre à 62%
des questions de la première composition pour obtenir la note de
85/100, ce qui signifie que d'autres candidats avaient fait mieux sur
cette première composition. Néanmoins, compte tenu du
niveau de la barre du dernier admissible, qui était de 89/100, on peut
dire que l'on pouvait être admissible en étant bien en dessous de ces
pourcentages de succès !
Dans la pratique, j'ai l'impression que répondre à plus du tiers des
questions d'un problème permet d'avoir de bonnes chances d'être
admissible. Cela est corroboré par l'étude d'une autre
copie d'agrégation interne concernant cette fois-ci la première
composition de 2009. Cette copie m'a été envoyée par un mégamathien qui
désirait avoir mon opinion sur son échec de peu. La
note portée par le jury était 8,8/20, ce qui était proche de la barre
d'admissibilité bien que seulement 23% du problème avait été traité.
Voici ci-dessous le décompte des questions traitées avec succès (S), en
essuyant un échec (E), et des questions non abordées (NA) :

Environ deux réponses sur trois proposées par le candidat sont bonnes,
mais cela ne constitue que 23% du problème entier. La prestation a été
bonne, sans être suffisante pour assurer l'admissibilité. Tout aurait été différent si le candidat n'avait pas proposé de
réponses fausses (en supposant trop vite en beaucoup d'endroit qu'une
certaine matrice était diagonalisable, alors qu'elle était seulement
diagonalisable par blocs), puisqu'il aurait traité 23% + 13% = 36% du
problème, ce qui aurait assuré son admissibilité.
¤ On apprendra comment se sont déroulés mes oraux dans l'article : Il faut s'autoriser à utiliser des recueils d'exercices corrigés à l'agrégation interne !
¤ Loi du 4-3-2 : quelle fraction d'un sujet suffit-t-il de rédiger pour être admissible ?