RELEVE
DANS LE MONDE DU 21.11.09
C'est parce qu'une enseignante veut faire cours que des
élèves d'une classe de terminale technologique du lycée parisien Jean-Lurçat
(13e arrondissement) tentent d'en changer. Claudine Lespagnol n'est pas
une débutante. A 58 ans, dont huit dans l'établissement, elle n'a plus envie
que les lycéens téléphonent ou envoient des SMS pendant ses cours d'anglais. Et
ne souhaite plus voir "des
filles s'y maquiller, miroir en main, ou s'épiler le sourcil", situation que dénonce une autre enseignante de la
même classe.
Claudine
Lespagnol est, de son propre aveu, "un peu sévère... enfin, si l'on considère que
leur demander de ranger leur téléphone - sans le leur confisquer, puisque nous
n'avons pas le droit -, c'est être sévère". Pour certains élèves, c'est insupportable.
Le
20 octobre, ils signent - à la quasi-unanimité de la classe - une lettre au
proviseur dans laquelle ils lui "conseillent vivement d'opérer un changement de
prof". La proviseur aura eu beau leur
expliquer son refus, le groupe ne lâche pas prise, et sous la signature "la TSTG2" - terminale sciences et technologie de la gestion -
adresse une missive au professeur, à qui ils viennent de voler une clé USB.
Ils
lui conseillent "de
procéder à un changement d'attitude, et de cesser de faire des remarques à
chaque fois que l'on a un téléphone entre les mains, car cela est une perte de
temps. (...) Vous nous prenez trop au sérieux en nous engueulant à
chaque cours". Singeant la rhétorique des bulletins
scolaires, avant de descendre d'un cran leur registre de langage, ils ajoutent : "Si ce n'est pas le cas et qu'il
n'y a aucun effort de changement de votre part, nous n'avons plus que quelques
mots à vous dire : allez vous faire enc..." Mme Lespagnol a déposé une plainte pour
cette lettre, les menaces verbales qui l'ont précédée, et le vol de sa clé USB.
Depuis
jeudi 19 novembre, les enseignants de ce lycée de plus de 1 200 élèves ont
débrayé. La proviseur est en arrêt-maladie. Lundi 23, l'inspecteur d'académie
devait dire à la classe "combien
ces faits sont inacceptables".
Mais il reconnaît que "la
sanction collective n'existe pas".
De leur côté, une partie des enseignants se trouvent bien peu soutenus par leur direction. Selon Marie-Hélène Fougeron, professeur et militante de SUD, aurait "été évoquée l'idée de changer l'enseignante d'anglais au nom de "la continuité du service public"". Reste à savoir si cette continuité du service public d'éducation, c'est d'être devant la classe ou bien d'assurer un cours.
Maryline Baumard
Cher collègue, Vous avez
sans doute lu dans le journal Le Monde du dimanche
22 novembre 2009
l’histoire atroce de notre collègue Claudine Lespagnol, professeur d’anglais au
Lycée Jean-Lurçat dans le 13ème arrondissement de Paris. Claudine a demandé à ses élèves
d’arrêter de téléphoner et d’envoyer des SMS en classe. Elle n’a pas confisqué
de téléphone puisque, comme vous le savez, c’est interdit. Résultat
immédiat, ses élèves ont signé - à la quasi-unanimité de la classe - une lettre
au proviseur dans laquelle ils lui « conseillent vivement d'opérer un changement
de prof ». Certains élèves ont
également écrit à Claudine pour lui demander d’arrêter immédiatement de leur
faire des remarques au sujet de leur téléphone portable : « Si ce n’est pas le cas et qu’il n’y
a aucun effort de changement de votre part, nous n’avons plus que quelques mots
à vous dire : allez vous faire enc… »… De plus, pour la
« punir », ils lui ont volé la clé USB sur laquelle elle a ses
cours. Vous et moi devons
réagir immédiatement. Ces agressions ignobles
envers notre collègue seraient normalement passibles de poursuites
pénales, pour vol et injures, peut-être même pour menaces, si elle
était un citoyen normal. Mais seulement voilà :
Claudine n’est qu’un simple professeur de l’Éducation
nationale. Dans son
cas, les Droits de l’homme semblent ne pas
s’appliquer !! En effet, elle
n’a reçu que très peu de soutien de la hiérarchie. Elle aura dû
attendre un mois pour qu'enfin l'inspecteur d'académie se déplace. Et encore :
il s'est contenté pour le moment d'un simple rappel à l'ordre, sous le faux
prétexte que « les punitions collectives » sont interdites par le
règlement !!! Pourtant, c’est bien
les uns après les autres que les élèves ont signé cette pétition et se sont
engagés pour demander la tête de leur professeur… Et ils vont peut-être
obtenir gain de cause : de sources syndicales, il est question de remplacer
Claudine par un autre professeur au nom de la « continuité du service
public » !!! Le proviseur, d'abord
en arrêt maladie, lui aurait finalement apporté son soutien. La seule solidarité
qu’elle a reçue pour l’instant est celle de ses collègues, qui ont débrayé
depuis jeudi 19 novembre. JUSQU'À QUAND
LES PROFESSEURS VONT-ILS CONTINUER À SE LAISSER MENACER ET
HUMILIER ? Ne
sommes-nous que des moins que rien ? Des
citoyens sans aucun droit, et que des devoirs ? N’y aura-t-il personne
pour faire la moindre remarque à nos élèves, pour qu’ils arrêtent de nous
cracher dessus, et parfois pire encore ? C’est pourquoi je
vous demande de
signer la pétition au ministre de l’Éducation nationale Luc Chatel, en
solidarité avec notre collègue Claudine Lespagnol. Ce qui se passe
là est d’une gravité sans précédent. Notre collègue doit recevoir notre soutien,
il y va de notre dignité. Personnellement, si
après avoir demandé à mes élèves d’arrêter de jouer avec leur portable en
classe, je recevais de leur part un tissu d’insultes aussi violentes, et que la
hiérarchie leur donnait raison, je me sentirais humilié, sali, déshonoré,
jusqu’au plus profond de moi-même. Heureusement, il semble
que Claudine soit d’une force morale exceptionnelle, et qu’elle tienne le choc
jusqu’à présent. Mais ce n’est pas une
raison pour la laisser toute seule. C’est pourquoi signer cette pétition de
solidarité avec elle est si important. Et j’espère que vous la
transmettrez immédiatement à tous les collègues !! Les élèves le savent : circulaire
après circulaire, toute la réglementation que le ministère de l’Éducation
Nationale a savamment écrite jour après jour, est là pour défendre
« l’enfant roi » contre la « tyrannie » de l’enseignant, pour
que le professeur n’abuse pas de sa supériorité d’adulte … Il faut bien
reconnaître que nous-mêmes, nous ne savons parfois plus ce que nous avons le
droit de faire. Chaque fois que l’on réprimande un élève, on se demande toujours
si on en a bien le droit. D’ailleurs, les élèves
sont les premiers à vous le faire remarquer : « M’sieur, vous avez pas le droit
de faire ça ». Ils vous expliquent ce qui est interdit. Avisez-vous de leur
demander de se taire, certains osent vous rétorquer qu’on est en démocratie et
que tout le monde a le droit de s’exprimer ! Et n’oubliez
pas que de votre côté ce n’est pas la même chose. Si un élève vous menace, il
faut qu’il vous menace deux fois avant que vous ne puissiez faire quelque chose.
Les avertissements ? Depuis trois ans, il est interdit de les faire figurer sur
le bulletin scolaire. Ça rime à quoi
? Aujourd’hui, on
a ruiné l’autorité des professeurs parce que l’on a considéré que l’autorité
c’est l’application d’une procédure. Le résultat est
tout simplement CATASTROPHIQUE, et ce sont les élèves eux-mêmes qui en sont les
victimes également. Car si nous ne
pouvons plus faire cours, que vont-ils apprendre ? Comment peuvent-ils préparer
leur avenir ? Notre devoir
d’éducateurs est de mettre fin à cette situation ubuesque. Mais pour l’heure, il
y a vraiment le feu à la maison et je vous demande de signer la
pétition. Je vous tiendrai
évidemment au courant des résultats et des suites que nous donnerons à cette
action, avec tous les membres de l’association SOS Éducation. Et surtout, faites
passer à tous les COLLEGUES ! Un grand
merci, David
Barbaud Professeur certifié
d’histoire-géographie Gisors, le 24 novembre
2009
Les
droits de l’homme valent-ils aussi… pour
les professeurs ?
Pour toute demande
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