On trouvera plus bas sur cette page les liens vers 5 cahiers contenant le Cours de Mathématiques
donné par Mme Jeanne Manotte, agrégée de mathématiques au Lycée
Saint-Exupéry de Saint-Raphaël, durant pendant l'année scolaire
1974-75. Ces leçons ont été recopiées par son
élève Dany-Jack Mercier.
On trouvera aussi les 12 devoirs (sur table et à la maison)
qui avaient été données pendant cette année scolaire. En classe de
terminale C en 1974-75 on comptait 9 heures de mathématiques par
semaine, ce qui donnait la possibilité de travailler en classe sur
de nombreux exercices, et d'avancer dans le cours avec précision et
efficacité. Mme Manotte était du reste une excellente pédagogue qui
faisait tout son possible pour que chacun de ses élèves puisse
progresser. Elle avancait dans le programme en essayant toujours de ne
laisser personne au bord du chemin, si bien qu'en mai, il fallu que
l'on assiste à quelques heures de cours supplémentaires pour terminer
notre travail sur le programme du BAC.
INTRODUCTION
Entre
professionnels de l'enseignement
des mathématiques, on discute souvent de l'évolution des programmes de
mathématiques et n'importe quel professeur de lycée connaît l'impact
malheureusement souvent négatif des nouvelles réformes qui s'enchaînent
à un rythme effréné depuis quelques années. Si certaines évolutions
sont naturelles et souhaitables, nous sommes nombreux à penser, sans
forcément pouvoir le dire, que d'autres ont uniquement pour objectif de
diminuer les heures de travail en classe, éliminer des
pans de connaissances essentielles à une tête mathématique bien
faite,
et privilégier une approche purement expérimentale (mais très
coûteuse en temps investi) des mathématiques où l'ordinateur sert de
référence ultime
et de justification à toute chose. Des pans entiers de programmes
pourtant essentiels aux futurs physiciens, chimistes et ingénieurs de
ce pays, passent à la trappe. Depuis ces dernières réformes, nous
n'étudierons plus du tout les arcs paramétrés, les coniques et le
produit vectoriel (qui pourtant est un outil essentiel pour les
physiciens) en terminale scientifique. Le barycentre est relégué au
niveau d'amuse-gueules dont on parle peu. Quant aux
structures d'espaces vectoriels et de groupes-quotients, elles ont
disparues du programme depuis déjà quelque temps alors qu'il s'agit du
coeur des mathématiques générales. Actuellement, les programmes sont
choisis en fonction des possibilités offertes par l'utilisation de
l'ordinateur : on parle ainsi beaucoup de statistiques et de
probabilités introduites par des expériences statistiques menées sur un
ordinateur, ceci dès les petites classes, et l'on est ainsi souvent amenés à
travailler sur des tableaux de nombres. La mode est à la gestion des
tableaux de nombres ! Indubitablement, ces genres de travaux fastidieux
et répétitifs vont encore éloigner de nombreux élèves du
parcours mathématique, du moins ceux qui étaient partant pour
réfléchir sur les concepts et supportaient un léger niverau
d'abstraction.
L'outil
informatique est un
précieux allié pour améliorer sa compréhension des concepts
mathématiques et permettre des investigations qu'il serait impossible
de mener autrement. Soit. Mais une utilisation exagérée de
l'ordinateur mène à une vision faussée des mathématiques où tous les
concepts sont présentés de façon expérimentale sans être
correctement justifiés et validés par l'emploi de la raison. Quel
sens donner à un enseignement des mathématiques destiné à des élèves
de terminale qui désirent faire carrière dans les sciences
exactes pour devenir les chercheurs et les ingénieurs de demain, qui ne
proposerait aucune définition rigoureuse de la limite d'une fonction
en un point ou d'une intégrale de Riemann ?
Avec
la réforme des lycées débutée en 2010, une certaine distorsion
s'accentue et l'esprit du programme de mathématiques d'une section
S option maths se rapproche maintenant de celui d'une BTS où
l'on demande d'admettre des résultats pour les appliquer sans se
poser de questions. Nous est-il permis de douter que ces choix
puissent mieux préparer nos élèves à utiliser les
mathématiques dans leurs professions, plus tard, quand ils seront
devenus ingénieurs ou chercheurs ? L'omniprésence et l'importance
donnée aux calculs statistiques à tout venant qui émaillent
actuellement les divers niveaux de l'enseignement du
secondaire ont-ils seulement pour but d'inciter nos meilleurs
étudiants à ne s'orienter que dans l'analyse des marchés financiers et
la finance ?
La mise en ligne de ces anciens cahiers de mathématiques recopié par un élève dans les années de la Grande réforme
permettra au chercheur en didactique et à tous les professeurs de
mathématique de disposer de documents originaux pour se faire une idée
précise de ce qui était enseigné en 1975, et de la façon dont il était
convenu d'enseigner à cette époque.
Dans ces cahiers, Mme Jeanne Manotte arrive à proposer l'essentiel de ce qu'un élève devait retenir,
approfondir et maîtriser. Il s'agit d'un concentré de connaissances
qui avait été analysé et détaillé pour nous et
avec nous pendant les heures de
cours, puis chez nous quand nous devions apprendre et appliquer ces
connaissances. Le découpage en chapitres était simple et efficace :
il permettait de
bien retrouver et retenir ces connaissances pour que nous
puissions nous y référer quand nous en avions besoin pour résoudre
un exercice. A l'époque, n'oublions pas que la section scientifique
dans laquelle nous nous trouvions en terminale proposait 9 heures
de mathématiques par
semaine. Je n'oublierai pas, aussi, que toutes ces heures ont été bien
remplies, et que Mme Manotte nous proposa même des heures
supplémentaires à la fin de l'année pour arriver à boucler un programme
exigeant autant que captivant. C'est d'ailleurs à cause d'un tel
professeur et d'un tel programme que j'ai finalement choisi de faire
des mathématiques plus tard au lieu de préférer m'intéresser plus avant
aux sciences physiques, qui étaient aussi très attirantes...
Si
le lecteur désire apporter un
commentaire personnel historique ou didactique concernant cette époque,
le programme et l'enseignement, je serai heureux d'en prendre
connaissance et de trouver une place sur cette page ou ailleurs
sur
MégaMaths, pour le partager avec nous tous, s'il est besoin. Avez-vous
des témoignages à me proposer concernant l'enseignement des
mathématiques tel que vous l'avez vécu et expérimenté ? N'hésitez pas à
me contacter.
COURS DE MATHEMATIQUES de Mme Jeanne MANOTTE
professeur en classe de TERMINALE C au Lycée Saint-Exupéry de Saint-Raphaël
Année scolaire 1974-75
Classe de terminale C (1974-75)
CAHIER n°1 - ANALYSE
- Compléments relatifs à : continuité, limites, dérivées.
- Fonctions vectorielles.
- Calcul intégral.
- Ensembles quarrables, aires.
- Logarithme népérien.
- Logarithmes de base a. Fonctions exponentielles de base a.
CAHIER n°2 - GEOMETRIE I - Espaces vectoriels et sous-espaces vectoriels.
- Applications linéaires.
- Structures.
- Automorphismes involutifs de E, espace vecrotiel sur R.
- Projections vectorielles.
- Barycentres, espaces affines.
- Applications affines.
- Homothéties-translations
- Projections sur D (ou P) parallèlement à D' (ou P').
- Involutions affines.
- Transformations orthogonales.
- Angles de couples de droites vectorielles.
Formulaire de trigonométrie 1975.
CAHIER n°3 - GEOMETRIE II
- Isométries
- Similitudes.
- Coniques.
CAHIER n°4 - NOMBRES & PROBABILITES I
- Ensemble N des entiers naturels.
- Principe des systèmes de numération.
- Etude de l'anneau (Z,+,.).
- Etude de l'ensemble Z/nZ.
- Rappels : divisibilité et pgcd.
- PPCM de deux entiers relatifs non nuls a et b.
- Nombres premiers.
- Ensemble des réels.
- Nombres complexes.
CAHIER n°5 - NOMBRES & PROBABILITES II
- Probabilités.
- Applications mesurables (ou variables aléatoires discrètes ; ou aléas numériques).
- Espérance mathématique.
- Epreuves répétées (ou tirage de Bernoulli).
- Inégalité de Bienaymé-Tchebychev.
- Loi des grands nombres.
Le lycée Saint-Exupéry dans les années 1970
PROGRAMMES DE TERMINALE C
J'ai
recontacté Mme Manotte avec plaisir en août 2012 et j'ai pu lui
demander de chercher si elle n'avait pas d'anciens programmes de
terminale C en sa possession. Je recherchais ces programmes depuis
longtemps et ne les trouvais nulle part. Joie suprême, Mme
Manotte a retrouvé des références qui feront plaisir à tous ceux qui
s'intéressent à l'histoire de l'enseignement des mathématiques, et
servira de base de réflexion pour ceux qui voudront comparer les
programmes des années 1970 avec ceux des années 2010 où l'on admet
presque tout, où l'on ne donne plus de définitions rigoureuses des
objets avec lesquels on travaille, et où l'on utilise des machines pour
soit disant prouver des résultats.
Si vous, lecteur de cette
page, possédez d'anciens programmes de mathématiques quels qu'ils
soient, n'hésitez pas à me contacter pour me les envoyer en pdf
: je pourrai regrouper ces documents sur cette page ou
dans la page de MégaMaths des programmes du secondaire. N'hésitez pas à me contacter :)En
août 2022, suite à l'annonce faite sur cette pag web, je remercie
Patrice Goyer pour m'avoir envoyé les programmes suivants de la section
C qui sont actuellement introuvables :
COURS DE MATHEMATIQUES de Mme Jeanne MANOTTE
professeur en classe de première C au Lycée Saint-Exupéry de Saint-Raphaël
Année scolaire 1973-74
Classe de première C2 (1973-74) :
CAHIER n°1 - ALGEBRE & ANALYSE Ce cahier de cours (version élève) permet de comprendre ce que l'on
pouvait demander dans les années 1970 à des élèves qui avaient choisi
la voie scientifique (série C). L'entrée en seconde C était subordonnée
à l'acquisition d'un certain nombre de prérequis pour permettre une
spécialisation dès le lycée. Cela permettait d'éviter à des élèves
d'essuyer des échecs à cause de lacunes patentes. Les horaires de
mathématiques de la série C était de 6h en seconde, 6h en première et
9h en terminale, à comparer avec ce qui reste actuellement en collège
et au lycée, permettaient de développer des compétences réelles en
sciences et motivaient pour se lancer avec succès dans l'enseignement
scientifique supérieur.
CAHIER n°2 - GEOMETRIE -
Voici le second cahier d'un cours de première C des années 1970,
traitant de la géométrie, permettant de découvrir le programme de
mathématiques de l'époque en série scientifique.
COMPARAISON DU PROGRAMME TC 1971 ET DU PROGRAMME TS 2013
Et
si nous comparions le programme de TC 1971 et le programme TS 2013 ?
Voici deux documents qui permettent de se faire rapidement une idée de
l'évolution des programmes, de ce qui a disparu et de ce qui est apparu.
Le premier document est le programme de terminale C de l'année 1971-72
où j'ai signalé toutes les parties qui ont été envoyées aux oubliettes
dans le programme 2013 en les surlignant en jaune. Il y en a beaucoup,
et il s'agit malheureusement de parties fondamentales qui sont la clé
des études universitaires en mathématiques comme en sciences physique
ou en SVT. D'autres notions continuent d'être enseignées, mais sans
fournir aux élèves une définition rigoureuse, donc en parlant avec les
mains et en se mettant dans l'impossibilité de proposer des
démonstrations qui utilisent ces notions. Le second document est le programme de terminale S de l’année 2012-13,
option maths, où j'ai mis en surbrillance les notions de mathématiques
qui sont apparues, essentiellement en probabilités et
statistiques.
Les propriétés des entiers naturels et des
réels ne sont plus étudiées, mais restent employées de façon
inconsciente. Comme on ne précise pas les axiomes fondamentaux qui
définissent N, on ne démontre pas le raisonnement par récurrence : on
l'admet en 2013. On étudie les congruences en 2013, mais plus les
anneaux Z/nZ. On travaille l'arithmétique, mais mystérieusement en 2013
on étudie les pgcd mais pas les ppcm.
On n'étudie plus les
propriétés de R. En 1971, c'était je pense une mauvaise idée
d'introduire les nombres complexes avec des matrices carrées de
similitudes, et la présentation en 2013 est plus simple et directe. Par
contre les linéarisations de polynômes trigonométriques ont disparu du
programme. On n'étudie plus les racines n-ièmes d'un nombre complexe,
et l'on ne cherche pas les racines d'un polynôme du second degré à
coefficients complexes : en 2013 on se borne à étudier des polynômes du
second degré à coefficients réels.
Pour la continuité, les
limites et la dérivation des fonctions, on ne donne pas de définitions
rigoureuses en 2013, donc on supprime beaucoup de démonstrations qui
s'appuyaient sur ces définitions, comme on le faisait en 1971. Le
nouvel élève devra admettre beaucoup de résultats et se contenter de
vérifications graphiques. Il devra faire confiance à son professeur et
à son manuel sans mesurer par lui-même la validité des énoncés qu'on
lui propose, puisqu'on ne l'incite plus à le faire. Dérivée de la
composée d'une fonction, d'une fonction réciproque d'une fonction
dérivable strictement monotone : on n'en parle plus, en tout cas pas de
façon générale.
L'étude des fonctions vectorielles de R dans un
espace vectoriel euclidien a complètement disparu, on n'étudie plus
aucune courbe paramétrée, et la cinématique du point est passée à la
trappe. Il n'y aura donc aucune interdisciplinarité avec les sciences
physique à ce niveau, mais il faut dire que le programme de sciences
physique a été grandement allégé en parallèle.
Les sommes de
Riemann ont disparu et l'on ne donne plus de définition
rigoureuse de l'intégrale d'une fonction numérique sur un intervalle
réel borné. En 2013, on présente l'intégrale essentiellement comme une
aire sous la courbe, et l'on admet la suite. L'intégration par parties
a été supprimée des programmes.
Les applications de
l'intégration à la mécanique et à la physique a disparu : plus de
calculs de volumes, de masses, de moments d'inertie, de vitesses et de
distances parcourues, d'intensité et de quantité d'électricité, de
puissance et d'énergie. Tout cela passe à la trappe.
Au niveau
des fonctions d'une variable réelle, on étudie toujours les fonctions
xn si n est un entier positif, mais plus si n est un rationnel. Sait-on
seulement d'ailleurs encore ce qu'est un rationnel ? Heureusement, on
parle encore de suites arithmétiques et géométriques, des fonctions
circulaires (sauf la tangente dont on ne veut plus entendre parler, la
laissant pour l'université). Le logarithme népérien et l'exponentielle
sont toujours au programme, même si la présentation que l'on propose en
2013 est étonnante et compliquée. On ne parle plus, par contre, des
fonctions logarithmes ou exponentielles en base a, ce n'est plus à la
mode bien que le logarithme décimal soit utilisé dans d'autres sciences.
En
2013, on n'utilise plus la règle à calculs, et heureusement, mais
plutôt l'ordinateur et les logiciels de tous genres, ce qui représente
une évolution normale des enseignements.
Mais pourquoi
s'interdire d'étudier des équations différentielles simples du premier
et second degré comme on le faisait en 1971 ? Pour s'interdire
d'utiliser des outils performants qui éclairent d'autres sciences ?
En
géométrie, la terminale S 2013 fait table rase : plus d'études de
transformations, d'isométries, de similitudes. Un élève commencera sa
première année de licence en ignorant complètement ce qu'est une
translation ou une rotation. Evidemment, on ne parle plus de structures
algébriques, on préfère rester dans le flou et ne pas savoir exactement
dans quel espace on travail. En restant très approximatif, on
peut donc éviter de définir ce qu'est un espace vectoriel, ne plus
parler du B A BA d'algèbre linéaire concernant les applications
linéaires, les images, les noyaux. Plus d'homothéties aussi. Plus de
barycentres, et plus de fonction scalaire (ou vectorielle) de Leibniz.
Plus de symétries ni de projections, dans le plan ou dans l'espace.
Plus d'applications affines, et plus de définition rigoureuse de
l'orientation d'un plan. En 2013, on peut cependant encore parler de
produit scalaire dans l'espace, celui du plan ayant été étudié en
première. On peut aussi parler d'équations cartésiennes de plan (mais
étonnamment pas de représentations paramétriques d'un plan) et de
représentations paramétriques de droites dans l'espace (mais
curieusement pas d'équations cartésiennes de droites dans l'espace).
Mais on a supprimé l'étude des rotations de l'espace, des vissages et
des applications orthogonales en général, on ne sait pas orienter
l'espace, et l'on n'apprend plus ce qu'est le produit vectoriel.
En
géométrie plane, et en 2013, on reste pratiquement au niveau du collège
puisque les expressions complexes des similitudes ont disparues (avec
les similitudes), que l'on ne parle plus du groupe des similitudes
(puisqu'on ne sait pas ce qu'est une structure de groupe), que l'on
n'étudie plus les coniques (donc les ellipses, les hyperboles et les
paraboles conserveront tous leurs mystères), ce qui supprime beaucoup
de problèmes qui étaient traités analytiquement.
Les
probabilités sont enseignées différemment en 2013 : on utilise la
machine pour faire de nombreuses simulations, mais on ne dispose plus
de définitions précises. L'étude des variables aléatoires réelles d'un
couple ou d'un produit a disparu. On ne parle plus de dénombrements, ni
de coefficients binomiaux dans ce contexte, mais on insiste sur les
arbres de probabilité.
Conclusion : le programme de terminale C
de 1971 comportait 185 lignes sur le bulletin officiel. On en a
supprimé environ 104 lignes pour aboutir au programme de terminale S de
2013, soit une perte de 56%. En 1971, un élève de terminale
scientifique suivait 9 heures de cours hebdomadaire, mais plus que 8
heures en 2013. Mais attention, l'élève de 2013 a moins d'entraînement
en sciences derrière lui puisqu'il n'a bénéficié que de 4h de
mathématiques par semaine en première S, au lieu de 6 heures en 1971,
et de 4h de maths en seconde au lieu de 5h en seconde C en 1971. Il ne
faut donc pas s'étonner à ce qu'il soit bien moins entraîné et savant
qu'un élève qui suivait les anciens horaires et les anciens programmes.
Le
programme de terminale S de 2013 comporte néanmoins des nouveautés et
non des moindres. Il s'agit des lois de probabilité à densité (loi
uniforme, loi exponentielle, loi normale), du Théorème de
Moivre-Laplace (admis) et de chapitres sur les statistiques
inférentielles avec l'étude des intervalles de fluctuation et des
intervalles de confiance. Ces chapitres imposent d'admettre de nombreux
résultats et d'essayer de comprendre des énoncés difficiles où
interviennent à la fois les notions de limite et de probabilités. On
peut raisonnablement se demander si ces chapitres sont vraiment du
niveau d'un élève moyen de terminale.
En outre, on peut
reprocher à ces nouveaux programmes d’avoir éliminé toute
interdisciplinarité entre les mathématiques et la physique alors que,
de façon évidente, la recherche fondamentale en physique nécessite une
nouvelle génération de chercheurs à mi-chemin entre les mathématiciens
et les physiciens. Galilée n’a-t-il pas dit « Le grand livre de la
nature est écrit dans le langage mathématique », et plus près de nous,
Max Tegmark, professeur de physique au MIT, énonce : « La réalité
physique extérieure dans laquelle nous vivons repose sur une structure
mathématique qui est en dehors du temps. Ceci veut dire, dans un sens
bien défini, que l’Univers est mathématique (…) » (relevé dans
l’excellent livre de Igor et Grichka Bogdanov (Bogdanov & Bogdanov,
2012)).
De plus, n’y a-t-il pas une arrière-pensée politique
dans l’écriture de ces nouveaux programmes, tant en physique qu’en
mathématiques, destinés à former des techniciens des sciences à large
spectre qui pourront bien mieux aller vendre leurs compétences dans les
secteurs commerciaux, bancaires et financiers, que dans les domaines de
l’ingénierie industrielle et de la recherche fondamentale ?
Les
Trissotins de l’éducation nationale qui ont concocté ces nouveaux
programmes sans concertation aucune avec les enseignants et le monde
scientifique, se sont permis d’ignorer les mises en garde répétées de membres éminents de l’Académie des sciences
(excusez du peu…) formulées en mars 2011. D’ailleurs, rien
d’important ne leur échappe puisque récemment ils se sont intéressés au
problème insurmontable des rythmes scolaires avec le succès que l’on
sait.
Nos décideurs de l’éducation nationale sont à l’image de
nos hommes politiques dans les coulisses du pouvoir : le nez sur le
guidon mais des ambitions affichées démesurées, sans donner aux
enseignants ni aux élèves les moyens de les mettre en œuvre. Comme on
peut le lire dans le communiqué de l’Académie des sciences de mars 2011
: « on voit apparaître des propositions assez surprenantes sur le «
modèle de diffusion d'Ehrenfest » ou les « marches aléatoires sur les
graphes » dont l'intitulé fait plutôt penser à des recherches avancées
de spécialistes... ».
C’est encore pire en physique où compte
tenu de la longueur démesurée du programme de terminale S, peu de
professeurs de sciences physiques pourront se targuer d’avoir terminé à
temps leur programme pour le bac de juin 2013. Des preuves ?
Décidément, Trissotin a pris le pouvoir.
******
Trissotin : immortel personnage de Molière, pédant ridicule par sa prétention et odieux par son hypocrisie.

Lycée Saint-Exupéry dans les années 1970
REACTIONS
Voici une lettre intéressante
d'un collègue de lycée au sujet de l'évolution du programme de
mathématiques. Je suis totalement d'accord avec cette analyse.
Voici
des extraits de méls de M. Claude Pomero reçus en mars 2013 - Je suis tombé par
hasard sur vos cours donnés par Mme Manotte en 1974-75. Elle a été
ma professeur pendant quatre ans au lycée Saint-Exupéry. Elle a
changé ma vie: quand je lui ai demandé en 1964 ce qu’il fallait que je
fasse après le bac :
elle m’a alors conseillé, en
roulant les rrrr..., d’aller en mathématiques supérieures. Je ne savais
pas ce que l'on préparait en maths sup, mais je me suis inscrit car je
lui faisais aveuglément confiance (et mes parents ne comprenaient pas
grand chose à tout ceci...). Après un parcours cahotique, j’ai fini
ingénieur en chef des Ponts & Chaussées et je suis actuellement
gérant de sociétés. J’ai toujours eu beaucoup de reconnaissance pour
cette professeure remarquable ; et j’ai reconnu son écriture sur vos
copies! Merci de votre bonne idée...
Il
m'est revenu une anecdote. J'étais convoqué à l'examen du permis de
conduire. Le surlendemain, j'avais classe avec Mme Manotte, et elle me
dit "Pomero, vous étiez absent avant-hier ?". Moi, tout content d'avoir
pour une fois une bonne excuse, je luis dis que j'avais passé l'épreuve
du permis de conduire... Elle me répond : "sachez, Pomero, que j'ai été
convoqué quatre fois sans y aller, parce que j'avais cours !".
"J'espère que vous l'avez eu, au moins ?" Quand je lui ai dit que je
l'avais effectivement réussi, un petit sourire sans commentaire vint
sur son visage et elle continua le cours...Réaction de mon ami José Félix, collègue de mathématiques et ancien élève de Mme Manotte, après l'annonce de sa disparition - Merci
de m'avoir fait partager cette nouvelle. Elle restera pour moi aussi le
professeur le plus marquant de ma scolarité. Elle m'a révélé la beauté des
mathématiques et leur grande rigueur. Elle
est partie, paix à son âme mais la transmission a eu lieu à travers toi et
d'autres professeurs. La vie est un grand mystère qui nous oblige à beaucoup
d'humilité.
Souvenirs
d'Yves Melot, un de mes camarades de classe, pour sa scolarité de 1968
à 1975 au lycée Saint-Exupéry de St Raphaël, ce 21 février 2022 - En
maths, c'est madame Manotte qui m'a épaulé pendant 2 ans, une super
prof. mais en SVT, Terrestri m'a donné la passion des pierres, madame
Falcou et ses minijupes, une prof de français et latin au top, son mari
en philo complètement dézingué mais brillant, et puis il y a eu cette
petite remplaçante en histoire géo dont j'étais amoureux, ce prof de
gym (pas Charlot le dingo) qui m a fait faire des tours de piste et m'a
donné confiance et grâce auquel je cours toujours. Dans les nuls le
prof. d'anglais dont je tairai le nom soyeux, un malheureux prof. de
math, moche et alcoolique qui m'a ruiné de la 6ème à la 3ème. Mais
c'était globalement un bon lycée, avec de bons souvenirs.
Souvenirs de Gilbert Lovera, ce 14 janvier 2023 - J'ai
retrouvé cette coupure de journal où l'on voit Mme Manotte et sa classe
de Mathélém pour l'année scolaire 1961-62 Je me trouve en première
ligne du haut à l'extrême gauche. C'était la dernière année où le lycée
Saint-Exupéry se trouvait à Boulouris, à l'emplacement du CREPS actuel,
avant d'ouvrir dans le centre de Saint-Raphaël. [Mme Manotte est sur la
rangée du bas, au 5e rang à partir de la gauche ou de la droite.]

Photo colorisée en 2023
Souvenirs de M. Ginesta, ancien maire de Saint-Raphaël -
On les trouve dans la coupure de journal ci-dessous.
Lettre de Mme Manotte adressée à DJM le 6 septembre 2004 suite à la parution
de la première édition du cours de géométrie
DEDICACE de mon livre Arithmétique des entiers paru en février 2017
Ce
livre est dédié à Mme Jeanne Manotte, professeur de mathématiques au
lycée St Exupéry dans les années 1970, qui vient de s'éteindre
paisiblement à Saint-Raphaël. Ce professeur plein de rigueur,
d'autorité, d'enthousiasme et de bienveillance, a été, et continue
d'être, mon mentor depuis que j'ai eu la chance de suivre ses cours
passionnants en première S en 1973-74, puis en terminale. Je la
remercie ici humblement pour tout ce qu'elle a apporté à des
générations d'élèves scientifiques.
J'entendrai toujours notre
professeur dire ses expressions favorites, en roulant les "r" et avec
l'accent chantant du sud-ouest : « de deux chose l'une » ; « qui peut
le plusss peut le moinsss », « nous pouvons rrraisonner par
contrrraposée », ou encore « changeons notrrre fusil d'épaule »... Ce
livre d'arithmétique correspond parfaitement à la rigueur et
l'honnêteté que nous a apprises Mme Manotte durant nos années de
formation.
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Dany-Jack Mercier rendant visite à Mme Manotte et son mari le 5 juillet 2000 | Au restaurant le Corsaire en 2002 |