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"Les pédagogies de l'apocalypse molle"


 
J'ai lu quelques passages du Blog de JEAN-PAUL BRIGHELLI, et je ne peux m'empêcher de conserver ces deux brillants extraits, et une citation géniale :

« Mais on préfère aujourd’hui faire lire aux enfants les contes du monde entier, écrits dans une langue soigneusement lavée de toute difficulté, un globish où le présent de narration est toujours préféré au passé simple, toujours trop complexe, le mot vulgaire au mot savant, et les bons sentiments à la complexité. Sans voir que les lycées-casernes enfantaient plus de Rimbaud forts en thème que les « espaces de vie » conçus par les architectes modernes : l’enfant profite de la contrainte, de la clôture, de la règle — sans nécessairement se la prendre sur les doigts. Il erre en revanche dans l’espace mental sans délimitation que lui dessinent les pédagogies de l’apocalypse molle. Et au lieu de sublimer ses frustrations en efforts, en travail, en désir de mieux faire, il les libère au tout premier degré en violence exercée sur les autres et sur lui-même. Le cancre-roi est le cancer des cultures dissoutes. Au lieu de lui imposer des paliers, on lui laisse la porte ouverte — à 83% de réussite, le Bac est-il encore un rite de passage ? »
Eloge des frontières, Jean-Paul Brighelli, 07 janvier 2011.

La civilisation, la culture, l’éducation — ou l’écriture —, c’est l’expérience des limites. « Le principe de laïcité, explique Debray, portait un nom : la séparation. » De l’Eglise et de l’Etat. De la sphère privée et de la sphère publique. De l’instituteur et du curé (ou du rabbin, ou de l’imam). « La loi au forum, le privé à la maison ». La séparation donne forme, donne corps. Eduquer, c’est, sans cesse, imposer des limites. Le barbare — celui qui est venu frapper à la porte de l’Empire, comme celui qui a enlevé Ilan Halimi — n’a ni limites, ni contrainte. Et c’est ce que nous fabriquons, à grands coups d’école ouverte, de dissolution des disciplines — l’idéal des pédagogistes —, de désordre. On veut nous faire croire que le désordre est créateur, quand c’est la contrainte qui accouche d’œuvres d’art. À Malraux qui demandait comment aider les créateurs, on répondit crûment : « Mettez-les en prison » — l’ombre de Sade, dont Debray souligne tout ce qu’il doit à la Bastille, est là pour en témoigner.
Eloge des frontières, Jean-Paul Brighelli, 07 janvier 2011.

Citation relevée dans le Blog de Jean-Paul Brighelli :
« Ne pas monter bien haut, peut-être, mais tout seul » (dans Cyrano de Bergerac, d’Edmond Rostand)

 

LE SCOOP : Les collaborateurs de Luc Chatel travaillent 18h par jour !
Moi aussi : quand je me promène, je pense souvent aux livres que je vais écrire, aux cours que je dois donner et à mes pauvres étudiants qui subissent toutes ces réformes folles... Je travaille donc beaucoup plus que j’en ai l’air !
Les collaborateurs proches de notre Ministre de l’E.N. travaillent 18h par jour pour nous concocter des réformes tous les trois mois. On comprends mieux cette frénésie. Avec seulement 6 h de sommeil par jour, s’ils s’endorment 2h de plus ailleurs, c’est en rêvant à changer le système.
Voici l’article lu dans “Le Point” et son dossier sur l’école paru en janvier 2011. Les 18h de travail par jour, le retour aux cadences infernales du début de l’ère industrielle, est dit, sans rire, à la fin du premier paragraphe. Serait-ce l’objet d’une des prochaines réformes ?




IL A REMPLACE LE PROF… DE SON FILS

Le Parisien du 20.01.2010 ( article publié dans la rubrique A la une).

 « On a beau avoir bac + 8, on ne s'improvise pas prof de collège. » Jacques Fossey, 66 ans, est parvenu à cette conclusion après avoir joué pendant deux mois au professeur de technologie. Président de la Fédération locale de parents d'élèves (FCPE) de Coulommiers (Seine-et-Marne), ce chimiste du CNRS en fin de carrière a accepté de remplacer, après les vacances de la Toussaint, une enseignante du collège de ses enfants, en congé maternité. Une vacation de dix-huit heures hebdomadaires, payée 36 € de l'heure, dans un établissement réputé tranquille. « C'est l'administration qui a soufflé l'idée, raconte-t-il. J'ai d'abord dit non… Puis oui, poussé par la curiosité de connaître l'école sous un autre jour. »
Il n'a pas été déçu et son expérience tient du sketch. « On m'a dit : “Ta salle, c'est la 17, voilà les clés ”» « Un inspecteur du rectorat m'a embauché un vendredi, après un entretien d'une heure, se souvient-il. Le lundi matin, j'étais en poste. On m'a dit : Ta salle, c'est la 17, voilà les clés . » Le début des ennuis.
« Dès que j'écrivais au tableau, les avions en papier volaient dans tous les sens, on se serait cru à Roissy ! s'exclame le chercheur en secouant sa crinière blanche. Il faut un minimum de formation pour affronter 30 adolescents, le mot discipline n'a pas de sens pour eux. » Jacques Fossey expédie les cancres au coin. D'autres filent chez les surveillants, lesquels lui glissent « qu'on ne peut pas renvoyer tout le monde » du cours. « J'en étais à penser que les gens n'éduquent pas leurs enfants quand j'ai réalisé que les miens étaient pareils, plaisante-t-il. J'ai failli écrire un mot pour les parents dans le cahier de correspondance de mon propre fils, Oscar ! »
Constatant que « la sévérité ne marche pas », Jacques Fossey décide « de ne plus tourner le dos à la classe » et d'utiliser « un vidéoprojecteur » et « beaucoup de photos ». Certains matins, le stress le réveille à 3 heures. Il en profite pour préparer, au calme et avec l'aide précieuse d'Internet, les cours des trois niveaux dont il a la charge (6e, 5e et 3e). La salle des profs ne lui est d'aucun secours. « Quand on est débordé par les élèves, les autres n'osent pas demander comment ça va. Chacun se débrouille de son côté. »
Et pourtant, Jacques s'est passionné pour la technologie. « J'ai appris plein de choses », conclut-il. Quant aux ados… « Pour six qui écoutent, tous les autres s'en foutent. »
Pas fâché d'arriver au terme de son contrat, à Noël, le chercheur s'en est retourné dans ses pénates comme il était arrivé : « Sans conseil ni briefing. » Les élèves, eux, ont rejoint la salle de permanence en attendant la fin de la récré : le retour de maternité, dans deux semaines, de leur professeur de techno attitrée.